Naissance du métier de guide en Vallouise
Le bureau des guides des Ecrins est donc une institution centenaire en 2009. Que de chemin parcouru en un siècle, et même plus si l’on pense à l’histoire du métier de guide en Vallouise.
En 1828, Alexis Liotard et Jacques Etienne Mathéoud travaillent aux champs, sont bergers peut-être, chasseurs de chamois quand ils ne sont pas occupés aux travaux ruraux, sans aucun doute. Ils aiment courir le caillou et les journées entières passées dans les pires terrains leur assurent pieds légers et sens de l’itinéraire.
Quand un officier de l’armée française vient solliciter leur concours pour gravir le Pelvoux, ils sont confrontés à un choix difficile : nécessité de rester aux champs pour optimiser un été trop court, ou partir vers l’altitude qui leur est si familière, de plus pour y gagner quelques sous.
Les guides de haute montagne ont toujours eu ce côté un peu marginal, décalé; tout simplement parce qu’ils laissaient les travaux des champs à la belle saison pour aller emmener les touristes en altitude. Aujourd’hui encore ils s’insèrent mal dans une société trop sécuritaire, dans laquelle le terme d’aventure est galvaudé.
Il est frappant de voir avec quelle intelligence ces deux guides en 1828 au Pelvoux ont trouvé un chemin évident, jamais difficile, pour atteindre le plateau sommital. A l’ombre le matin, le couloir Coolidge est raide, monotone, austère, dangereux aux heures chaudes de la journée lorsque le soleil y darde ses rayons. Il demanderait, avec le matériel de l’époque, de s’employer à tailler des marches des heures durant. Le glacier des Violettes, lui, est exposé aux chutes de glace, présente des labyrinthes de crevasses perfides face auxquelles des cordes en chanvre nouées à même la taille sont de piètre protection.
Les Rochers Rouges sont ensoleillés, jamais difficiles, sans danger excessif même aux heures chaudes de l’après midi. La seule barrière glacée pour les atteindre au 19 ° siècle est ce fameux Glacier du Clot de l’Homme qu’il faut traverser en taillant des marches dans la glace. Mais il ne présente guère de ponts de neige trompeurs, sa glace est franche, et sa traversée de courte durée. Au sommet des Rochers Rouges, il ne reste plus qu’à évoluer sur un glacier relativement débonnaire qui oppose certes quelques crevasses incontournables, mais d’extension modeste. Assurément, les guides de haute montagne de 1828 étaient des précurseurs et de grands connaisseurs de leur montagne : ils ont su mener à la cime leur premier «voyageur», en sécurité, par un itinéraire qui reste aujourd’hui le moins technique et le moins exposé aux dangers objectifs.
Liotard et Mathéoud ont su gagner la confiance et l’estime du capitaine Durand qui, deux ans plus tard, les a sollicités afin de l’accompagner pour la seconde ascension, qui fut la réelle expédition scientifique. A cette occasion, un autre guide, Pierre Antoine Barnéoud, est mandaté, ainsi que des porteurs. Deux ans d’existence et déjà la profession s’organise : guides, porteurs…
Les guides pionniers
Les guides de haute montagne des dix-neuvième et vingtième siècles ont écrit en lettres d’or l’histoire de l’alpinisme au Pays des Ecrins. Aprés Liotard et Mathéoud, C’est au tour de Pierre Antoine Barnéoud de s’illustrer. En 1848, il vit en compagnie de Puiseux la naissance du véritable alpinisme, non pas celui du scientifique, mais celui du touriste, l’acte gratuit. Puiseux qui a eu écho de l’ascension de Durand, veut la renouveller; il s’attache les services du vieillissant Barnéoud, 64 ans, et part bivouaquer en sa compagnie aux cabanes de Provence, et non pas à l’abri « Puiseux ». Arrivés sur le plateau sommital, à plus de 3800 m., Barnéoud se repose tandis que Puiseux monte au signal Durand encore debout vingt ans après; il mentionne dans son récit le sommet principal qu’il voit sans préciser si il s’y rend…voir à ce sujet le chapitre concernant le capitaine Durand….
Suivront bien d’autres, Pierre Antoine Reymond qui inaugura la traversée du Pelvoux avec descente par le glacier des violettes, Jean Pierre Engilberge et Eugène Estienne au col est du Pelvoux et au couloir Mettrier, encore sur le Pelvoux. Quel sommet ! Et le vingtième siècle s’étire, en compagnie de Pierre Engilberge, Benjamin Reymond, Jean Giraud, et puis Victor Chaud, au Pelvoux encore qui surmonte le terrible couloir qui porte son nom en 1950 avec Emile Cortial. Tiapa Langevin, incontournable, integre le bureau en 1953; il est le premier à venir « de l’extérieur », talonné de près par Paul Keller. Puis vient le temps de André Giraud, fils de Jean, qui signe des premières retentissantes et variées, la sud est des Bans avec Tiapa, Jean Pierre Fedèle et Jean Lepeut en 1963, la première descente à skis de la calotte des Agneaux en 1964…Et l’Histoire continue, elle est en marche, avec les Raymond Péru, Marcel Molinatti, Stéphane Troussier, Jacques « Pschitt » Perrier qui soutiennent les « jeunes » virtuoses, Seb Foissac, Fred Roulx, comment ne pas en oublier ? Marie Claire Hourcade est entrée au Bureau des Guides dans les années 2000, témoignant d’une ouverture encore trop timide du milieu des guides à la gent féminine mais qui avance doucement.
Aujourd’hui la profession s’est institutionnalisée. En 1909, la fraternelle des guides et porteurs de Pelvoux voit le jour. Le bureau des guides des Ecrins en perpétue l’héritage, sur des sommets toujours aussi sauvages.
Passeurs d’émotions depuis 1909
Certes les glaciers se sont retirés, quelques pans de rochers se sont effondrés. Mais les arêtes lumineuses transperçant le ciel d’azur attisent les mêmes passions, le contact rugueux du granite et du gneiss élève aux mêmes émotions, quand, après de longues marches dans les mélèzes, les alpages, parmi les moraines, sur les glaciers, les campaniles de roches édentées, le regard s’illumine de larmes abreuvant une soif d’émerveillement insatiable.
BUREAU DES GUIDES ET ACCOMPAGNATEURS DES ECRINS
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BUREAU DES GUIDES ET ACCOMPAGNATEURS DES ECRINS
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Le Bureau des Guides et Accompagnateurs des Écrins est affilié à la compagnie des guides OISANS ECRINS
qui regroupe les bureaux des guides du massif des Écrins :
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- La Guisane – Serre Chevalier
- La Grave – La Meije
- L’Alpe d’Huez
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- Bourg d’Oisans
- Valgaudemar
- Les Ecrins – Vallouise